Moi aussi

Laisse tomber c'est pas grave

Quel probleme? A part emballer des mecs hétéros

Non t'es pas d'humeur pour une conversation sérieuse, oublie

Luka... M'oblige pas à te le redemander, c'est toi qui m'as mis dans une situation de merde je te rappelle. Alors maintenant parle

Je sais pas, ça passera peut-être un jour, c'est rien.

*En lisant le dernier sms de son frère, il pousse un soupir doublé d'un juron. Rapidement, il pianote sur l'écran de la voiture pour qu'elle compose le numéro de son double. Impatience qui l'étreint en attendant qu'il se décide à décrocher - et lorsque c'est le cas, il est à deux doigts de l'explosion mais se force à se calmer.* Salut. T'es décidé ou il va falloir que je débarque chez toi pour te faire parler? *Profond soupir, de nouveau.* Ecoute, je sais que je m'emporte en une demi-seconde, que je suis loin d'être un exemple, mais... *Il se mordille la lèvre inférieure* En vrai, ça me fait chier quand tu sors des trucs comme ça. *Ca m'inquiète, aurait-il pu dire. Mais il ne le fera pas.*

*Il soupire en grand coup en attrapant son visage entre ses mains. Il a un problème, il commence à s'en rendre compte. Pour autant, c'est difficile de se l'admettre réellement. Lorsque son téléphone sonne, il pose ses prunelles sur son écran et décroche dans un mouvement las et résigné. Silencieux, il ne l'interrompt pas avant que Cali ait terminé de parler.* C'est moi ou tu t'inquiètes là? Qui êtes-vous, qu'avez-vous fait de mon frère? *Il tente un brin d'humour, mais il n'est plus vraiment d'humeur à ça.* J'espère vraiment pas que j'ai ruiné sa vie, quand même...

*Il secoue la tête face au pauvre humour de son frère, levant les yeux au ciel par la même occasion. La route file à une vitesse bien trop élevée pour suivre la réglementation, mais ce n'est pas vraiment sur elle qu'il est à présent concentré.* Je ne sais pas, pourquoi t'essaierais pas de lui en parler? Et si c'est le cas tu t'éloignes, point barre. Tu ne lui dois rien, il savait ce qu'il avait quand vous vous êtes embrassés, donc ciao bye bye tu disparais. *Mentalité de célibachien qui le poursuit encore et toujours.* Mais ce n'est pas ça le fond du problème. Luka... Arrête tes conneries. Je sais que tu ne me dis pas tout. *Sentiment qui l'étreint, menaçant et tenace. Son jumeau ne va pas bien. Et à ressentir ce qu'il ressent à présent, Cali se demande comment Luka a pu tenir durant son enfermement.*

*Evoquer Eskil n'est que la face visible de l'iceberg. Ce n'est pas le fond du problème, il en a parfaitement conscience.* J'en sais rien, il me fait de la peine avec son air de chien battu constant. *Luka et son empathie. Véritable fléau. Il soupire et glisse ses doigts dans ses cheveux.* J'y pense depuis quelques jours, en fait. Depuis le temps qu'un collègue m'a fait la réflexion. En salle de pause, ils discutaient de leur week-end et l'un d'eux m'a sorti un "Ben toi Luka, t'es sorti picoler comme d'hab !" ça m'a fait rire sur le coup mais... Ouais. Tout le temps. J'ai du mal à me souvenir d'un week-end tranquille chez moi à rien faire.

*Donner dans les discussions sérieuses avec Luka n'a jamais été son fort, et c'est rapidement la taquinerie qui l'emporte.* L'air de chien battu? Si ce n'est que ça, en voilà un qui t'est parfaitement assorti. *Pourtant, lorsque le ton de son frère change et que les mots sortent enfin, c'est tout son sourire qui disparaît. Pour une fois, Cali l'écoute. Réellement. Et ce qu'il entend, loin de ne pas lui parler, l'amène à se demander de quel manière l'homme qu'il est pourrait aider Luka.* Je ne pense pas que je sois le mieux placé pour te donner des conseils. Enfin, j'veux dire... Vu ce que je suis et ce que j'ai toujours été, ce serait un peu se foutre de la gueule du monde. *Il se mordille la lèvre, songeur - pour un peu, il en aurait presque raté la sortie d'autoroute qu'il devait prendre.* J'ai envie de te dire que c'est un problème si tu ne sais plus le gérer. Te gérer. Si sortir devient une nécessité et non plus un besoin passager. Si t'as plus envie de passer une soirée sans te la mettre à l'envers. Là, éventuellement... *Il hausse les épaules, laissant sa phrase en suspens - acte ridicule puisque de toute façon, Luka ne peut pas le voir.*

*Malgré sa baisse de régime passagère, il ne peut s'empêcher de rire légèrement à la remarque de son frère.* Me pousse pas à me taper le frère cousin de ton psy. *Ce serait dommage. Ou pas? Difficile à dire* T'inquiète pas, je ne m'attends pas à ce que tu me donnes des conseils ou je ne sais pas quoi. C'est juste que... Je ne sais pas, je réalise que j'ai peut-être un problème moi aussi. *Comme quoi, les jumeaux sont vraiment nés sous une mauvaise étoile, c'est incroyable.* Eventuellement quoi? Je suis foutu? En fait, pour te donner un peu plus d'explication, ça a commencé l'année dernière. En septembre. *Une date pas vraiment anodine, puisqu'elle correspond à l'internement de Cali, fin aout, à peu de chose près.* J'ai pas vraiment supporté de me retrouver tout seul d'un coup. Au début, je sortais pour me changer les idées, ça m'aidait pas mal et je rencontrais du monde. Et puis ça a continué au fil des mois, ça me faisait du bien. J'arrivais pas à rester chez moi, parce que je pensais trop à toi. J'avais pas de nouvelles, Cali, ça me tuait littéralement. *Sa voix se fait un peu plus basse sous l'émotion, mais il se reprend.* Bref, tu es sorti, mais mon besoin de sortir pour me mettre la tête à l'envers n'a pas disparu.

*Etrange de penser que Luka puisse rencontrer de pareils états d'esprit. Même si bien souvent ils sont considérés comme les deux faces d'une même pièce, entendre les propos de son frère laisse Cali songeur.* Foutu, faut peut-être pas abuser. *Même pas capable de le laisser parler sans l'interrompre - mais des deux, celui qui serait bon à jeter car complètement foiré, ce n'est clairement pas l'aîné. Il l'écoute, lèvre inférieure mordillée puis pincée lorsqu'il comprend enfin d'où vient la lubie de Luka et son aversion pour l'alcool. Touché, coulé.* Je vois. *Menteur. Il soupire.* T'es pas foutu, Luka, arrête de dire des conneries pareilles. Mais peut-être que tu as besoin d'un coup de main. Tu peux venir avec moi chez le psy, les séances seront moins craignos, j'imagine. *Grimace.* T'en as parlé à tes amis proches? *Ceux qu'il compte sur les doigts d'une main et qui sont déjà trop nombreux aux yeux de Cali.* Je suis désolé que tu aies été aussi mal pendant cette dernière année... *Sa voix s'affaisse et malgré la qualité audio de la voiture, ce changement marque la conversation.* Mais il en était sans doute mieux ainsi.

*C'est difficile d'admettre qu'on a un problème, surtout quand il lui a toujours semblé être le plus équilibré des deux frères. Peut-être faisait-il fausse route, finalement. Surpris, la suggestion de Cali lui semble pour le moins invraisemblable.* Aller voir ton psychiatre? J'ai déjà suffisamment à faire avec son frère cousin. *Et sinon, blague à part?* J'me sens pas de parler à un psy pour l'instant. *Parce que cela rendrait le problème encore plus concret alors qu'il n'est qu'au stade de la supposition à l'heure actuelle.* Non j'ai rien dit à personne, à part toi. Je ne suis pas le genre à me plaindre ou à raconter ma vie à qui que ce soit. *A part à quelques exceptions quand il était au plus mal et que l'internement de Cali a glissé dans la conversation. Seules trois personnes sont au courant. Pas sûr que ça plaise à son jumeau d'entendre ça alors il s'abstient. il reste également silencieux quand son frère s'excuse pour l'année difficile qu'il vient de vivre. Que répondre à ça? Que ce n'est pas grave? Bien sûr que ça l'est.* C'est pas de ta faute. *Si, totalement. Mais c'est plus fort que lui, il faut toujours qu'il prenne sa défense.* Les médecins ne voulaient jamais rien me dire et j'avais pas le droit de te voir, c'était pourtant pas faute d'insister. J'ai même forcé en sortant mon insigne une fois, mais ça n'a rien changé.

*La voiture est garée dans la pénombre, le moteur est coupé depuis quelques secondes mais Cali ne bouge pas. Comme si au fond, cette conversation aussi surprenante soit-elle, ne lui permettait pas de quitter l'habitacle pour se hâter vers son prochain rendez-vous.* Faudra m'expliquer comment tu peux parler autant sans raconter ta vie à qui que ce soit. Ca relève limite du miracle à ce stade. *Il rit doucement, malgré lui, malgré la tension et la crainte qu'il sent chez son double et qui ne fait qu'attiser les siennes. Il n'est pas surpris que Luka ait essayé de lui rendre visite à l'hôpital. Et pour cause. Tout cela, il le sait parfaitement.* Je sais que tu leur en veux, mais ils essayaient simplement... *de quoi, Cali? Comment avouer ce qui te semble à toi impossible à reconnaître?* ... de te protéger, d'une certaine façon. *Il se passe une main fatiguée sur le visage et dans sa barbe naissante.* Et puis, si tu avais dépassé les portes de l'HP, ce n'est sûrement pas moi que tu aurais vu de toute façon. *Le sûrement est de trop. Mais au moins, une partie du Pourquoi et de la vérité à son sujet est enfin sortie.*